LA VILLE DE BOUGIE
Bâtie en amphithéâtre sur le versant Sud du Gouraya, montagne de 600 mètres d'altitude, au fond d'un golf qui offre l'aspect d'un vaste lac entouré d'un rideau de hautes montagnes, la ville de Bougie doit cette situation d'être complètement abritée contre les tempêtes du Nord et Nord-Ouest si violentes et Méditerranée.
Armes de Bougie
Le voyageur qui arrive à Bougie par mer, sur un des paquebots qui assurent ses relations avec Marseille-Alger et Philippeville, embrasse dès qu'il dépasse le Cap Bouak un panorama merveilleux, au centre duquel se dresse, majestueuse, la montagne du Gouraya, dominant de sa masse géante les étages successifs des différents quartiers de la ville. Dans le lointain, il aperçoit, par la trouée de la vallée de la Soummam, les hautes montagnes du Djurdjura, à sa gauche et derrière lui, dans un cercle grandiose et ininterrompu qui parait fermer le golfe, la chaîne des montagnes de Beni-Mimoun et des Babors dont les principaux sommets atteignent près de 2.000 mètres.
Le coup d'œil en hiver, lorsque toutes ces montagnes sont couvertes de neige et que les rayons d'un soleil, doucement chaud et lumineux, se reflètent sur les eaux bleues, les cimes neigeuses et les coteaux verdoyants, au milieu desquels émerge Bougie, est réellement féerique et digne d'inspirer la palette du peintre et la lyre du poète.
Porte Sarrazine Café Restaurant à la brise de mer
Au centre du nouveau port, aménagé pour recevoir les navires du plus fort tonnage, à une centaine de mètre des bords du quai, le voyageur rencontre en débarquant la porte Sarrazine (Bab El Bahar) vieil arceau en ogive, de pierres et briques, soigneusement conservé qui faisait partie des fortifications arabes. Autrefois les balancelles franchissaient cette porte, pour venir s'abriter dans une petite rade aujourd'hui comblée.
Une ruelle à pente très rapide et un escalier de quelques marches conduisent à la place de l'ancienne sous-préfecture sur laquelle s'élève, dominant la mer, un coquet édifice de construction moderne qui abritait le représentant du gouvernement à Bougie, et les bureaux de son administration.
Si le voyageur hésite à suivre ce chemin, il peut accéder au même point, en longeant la ligne du quai jusqu'au pied du Fort Abdelkader et en remontant la rampe Réguis qui le mène, par une pente douce, devant plusieurs beaux immeubles, édifiés sur les flancs du coteau de Bridja, à l'endroit où s'élevait à l'époque hammadite Palais de la Perle construit par En-Nacer.
Sous-Préfecture
Royal Hôtel
De la place de la sous-préfecture, part le boulevard des Cinq-Fontaines, qui conduisait au Royal-Hôtel, établissement de premier ordre, pourvu de tout le confort moderne et tenu avec un soin et une propreté minutieux. Cet établissement pouvait rivaliser avec les hôtels les plus réputés d'Alger et de Biskra. Honoré de la clientèle de tous les gouverneurs généraux depuis M.Jonnart qui le citait comme un modèle d'hôtel bien tenu, il était pendant la saison hivernale le rendez-vous de tous les touristes de marque qui visitaient la Kabylie et dont les automobiles pouvaient se remiser immédiatement, soit dans l'immense garage de l'hôtel soit en face et à quelques mètres à "L'Auto-Garage".
De la place du Royal-Hôtel on monte vers la ville, soit par la rue Trézel, soit par l'escalier monumental qui continue le boulevard des Cinq-Fontaines et dont les marches semblent vouloir escalader la masse géante du Gouraya.
La rue Trézel, principale artère de la ville passe devant le Cercle militaire, la Mairie où admirer la superbe mosaïque, découverte en 1891, dans les fondations de l'hôpital civil, près de l'ancien Palais de l'Etoile, et la copie du magnifique tableau d'Horace Vernet, où est campée si fièrement la silhouette du général Trézel conduisant ses troupes à l'assaut de Bougie, l'hôtel d'Orient, le plus ancien de la ville, établissement admirablement situé et doté d'une salle à manger, d'où l'on jouit d'une vue merveilleuse sur toute la rade du golfe, et les ex-bureaux du Syndicat d'Initiative où le touriste était toujours certain de trouver tous les renseignements dont il avait besoin.
Mosaïque de la Mairie
Place de Gueydon
Grand Café RICHELIEU
Brasserie du Phénix
Elle débouche ensuite sur la place de Gueydon, du haut de laquelle un panorama saisissant se déroule sous les yeux du spectateur, qui embrasse tout à la fois l'ensemble de l'immense cirque que les montagnes au pied duquel s'étale, une vaste nappe claire et azurée, le golfe entier dans le fond duquel s'estompent les contours des caps Cavallo et Bougaroune, tandis que derrière lui se dressent les étages successifs de la haute ville et les escarpements du Gouraya.
De la place de Gueydon, la rue Trézel se continue jusqu'à la place Clément-Martel, autrefois place de l'Arsenal, d'où un large boulevard , le boulevard François-Biziou, permet de descendre au quartier commerçant et industriel du Camp-Inférieur, tandis que, sur la droite, une rue en pente rapide, la rue Fatima, conduit vers les hauts quartiers de la ville, en passant devant l'École de fille indigènes ; la Mosquée, joli monument d'architecture arabe orné de carreaux de céramique du plus heureux effet, l'école indigène des garçons, le fort Barral ou Moussa, massive construction hammadite, restaurée par les Espagnols, et enfin l'hôpital civil, installé avec tout le confort et l'outillage des établissements similaires les mieux organisés.
Si à quelques mètres de la place Gueydon, en face du marché couvert, on quitte la rue Trézel en prenant à sa droite, on peut monter vers la ville haute par la rue des Vieillards, ainsi dénommée parce que, au moment de la prise de Bougie, cette rue était habitée par les vieillards de la ville, qui y furent découverts dans une maison où ils s'étaient réfugiés. Cette longue artère conduit jusqu'au quartier de Bridja, vaste plateau aéré, sur lequel sont édifiées les casernes et plus bas l'Hôpital militaire et l'Atelier pénitencier militaire des travaux publics.
La Mosquée
Les monuments les plus saillants de Bougie sont l'Hôtel-de-Ville, la Sous-préfecture, la Mosquée, l'hôpital civil, l'Eglise. un Musée très intéressant dû à l'initiative personnelle et aux patients travaux d'un amateur méritant, M.Cazaubon, conservateur de ce Musée, est installé dans une des salles d'un auquel on accède par un escalier faisant communiquer la place de Gueydon et le port. Ce Musée où l'on admirera notamment une très belle mosaïque découverte à Mansouriah (Ziama Mansouriah).
Sur la façade de l'Eglise, construite depuis la colonisation, ont été gravées les armoiries de la Ville formées d'un écu chargé d'un croissant, d'une comète et d'une ruche. Le croissant rappelle la domination musulmane, la comète celle de 1858, année de la construction de l'Eglise, la ruche est l'emblème de l'activité des population kabyles, en même temps quelle rappelle la cire servant à faire les bougies qui auraient tiré leur nom de celui de la ville.
Le singe, qui supporte l'écu, indique la présence de ces animaux en grand nombre aux environs de la ville.
Les monuments anciens sont : la porte Sarrazine, le Fort Abdelkader sur les quais du port, la Casbah sur la porte de laquelle on révèle les intéressantes inscriptions suivantes :
FERDINANDUS
V. REX HISPA-
NIAE
INCLITUS
VI
ARMORUM
PERFIDISAGA
RENIS HANC
ABSTULIT VR
BEM
ANNO MOV IIII
“Ferdinand V, illustre Roi d’Espagne, a enlevé par la force des Armes cette ville aux perfides enfants d’Agar en l’an 1509.”
QUAM MHRIS
CASTELLIS Q.M.V
NIVIT IMP, H. A
CAROLUS FERDINAN
DI MEMORATI
NEPOS ET HA
ERES SOLI DEO
ONOR ET GLORIA
"Cette ville a été pourvue de murailles et forteresses par l'Empereur Charles Quint l'Africain, petit-fils et successeur de Ferdinand. A Dieu honneur et gloire ! "
Le fort Barral ou Moussa, les mosquée de Sidi-Touati et Sidi-Abderrahmane et la vieille porte Fouka, qui donne accès au chemin conduisant au cimetière indigène et dont les tourelles sont restées ce qu'elles étaient il y a huit siècles.
Porte Fouka